Comme
un fil rouge, j'alimente régulièrement ces chroniques avec des expressions à la con
qui jalonnent notre quotidien. Vous savez, ces expressions creuses comme des
spéciales d'Oléron, qui ne veulent rien dire, qui ne servent qu'à meubler
l'embarras de ceux qui préfèrent une banalité intrusive à un silence
intelligent. Le genre « c’est pas évident » (prononcer « c’est
pô évident » pour sonner comme ma boulangère, qui est aussi aimable qu’un
Panzer Tiger V, cette conne).
Parmi
ces pépites de stupidité pavlovienne, il y a un idiome que vous avez forcément
entendu si vous avez acheté des vêtements une fois dans votre vie. Donc, vous
l'avez forcément entendu. Ce fameux… "Ça va se détendre"... Essayez
un jean, des chaussures, un manteau, des gants, vous y aurez droit, aussi sûr
que Louis XVI eut le droit de se regarder la nuque sans utiliser de miroir. Je
me demande d’ailleurs si le bourreau, au moment de lui bloquer la tête dans la
lunette, lui dit « ne vous inquiétez pas Majesté, ça va se détendre ! ».
Vous
êtes bien, le produit vous plaît, ça vous va quoi qu’un peu serré, mais il faut
assumer le skinny, et vous sentez que ça va tomber. Aussi fatale et mécanique
que la lame sus-évoquée, cette phrase, cette sentence débile prononcée
par une engeance fébrile à l’idée de vous vendre sa fripe, fuse. La connerie
est comme cyclone : on sait la prévoir, on ne peut pas l’empêcher d’arriver,
et elle fait des dégâts énormes. Et comme dans un cyclone, l’œil d'un con est une zone creuse et plate (décidément, c'est ma journée huîtres). Heureusement, dans le cas qui nous occupe, la
chose qui sert de vendeur/vendeuse est une petite brise de mer.
Par effet pavlovien toujours, vous entrez en mode action/réaction et vous
sentez le Bigard monter en vous. La contre-mesure « Sans blague, CONNARD ! »
arrive immédiatement et votre bouche n’attend que l’ordre de s’ouvrir pour
tirer. Mais une zone plus diplomatique de votre cerveau préfère rappeler à l’intéressé(e)
qu’en 30 ans d’expérience, vous avez toujours vu vos jeans rétrécir au premier
lavage, et pas l’inverse.
J'ai acheté un jean l'autre jour. J'ai pris du 32 plutôt que le 31 conseillé, parce que hein, on ne me la fait pas. En rentrant le soir, je l'essaie à nouveau en regardant le journal télévisé. Il avait une taille de trop ! Ô orgueil, qu'as-tu fait de moi !
En voyant le spectacle navrant de ce pauvre
président dans un costume d’homme d’Etat trop grand pour lui, je n'ai pu contenir un « allez va, t’inquiète pas, ça va se détendre ! ».
Dans
un prochain billet, nous verrons comment au bout de 20 ans de pratique de
téléphone portable, une majorité d’utilisateurs continue de dire "Ça a
coupé" après une interruption. "Ah bon ? Ben non, en fait, je t'ai raccroché au nez juste histoire de me détendre !". Désormais donc, ne dites plus "ça a coupé", mais "putain d'iPhone !".
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